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Le Club Expert Dugas 2017

La rentrée est chargée mais comment pourrait-on s’en plaindre ? France Quintessence a ouvert la saison des salons, suivi par un très bon Whisky Live, et il est temps maintenant de retrouver l’écrin du Musée des Arts Forains pour le club expert Dugas.

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L’endroit fait toujours son effet, avec son ambiance baroque et feutrée. La lumière est tamisée, les dorures et les velours éclatent au grand jour ou luisent dans l’ombre, les personnages et animaux de bois sont magnifiques et inquiétants, à la manière de Zoltar dans le film Big avec Tom Hanks.
Cette ambiance décalée et la dimension humaine du salon en font une parenthèse cosy et hors du temps, propice à l’abandon du dégustateur aux élixirs que les rhumiers vont faire jouer sous nos yeux.
Entrez entrez mesdames et messieurs, prenez votre verre de dégustation à l’entrée et allons-y…

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C’est toujours un plaisir de saluer Yoshiharu Takeuchi, créateur des rhums Japonais Nine Leaves. Comme pour les distillateurs des Whiskies Chichibu chez qui il appris son art, l’eau est un élément essentiel dans la confection d’un spiritueux. C’est donc la découverte d’une source d’eau extrêmement douce, près de Kyoto, qui a décidé de l’emplacement de sa distillerie. Il s’est ensuite équipé d’alambics de chez Forsyths et a commencé à travailler avec un sucre de canne non raffiné, sous forme de blocs, une sorte de muscovado provenant d’Okinawa. La double distillation s’effectue dans deux alambics pot-stills différents.

Il présente, depuis quelques années déjà, un rhum blanc ainsi que quatre rhums ambrés élevés en fûts de chêne Français, Américain, ex-Cabernet Sauvignon, et un assemblage plus mystérieux appelé Encrypted.

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J’ai choisi de redécouvrir le rhum Angel’s Half American Oak Cask pour ouvrir cette journée de dégustations.
Le nez est pur et minéral, fruité et floral à la manière d’un whisky, avec des notes boisées fraîches. Il s’ouvre sur un rhum de style agricole élevé sous bois.
La bouche est agréable et consistante, la sensation est bien pleine et riche, avec des notes de canne, de bois frais et un côté miellé – vanillé.

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On ne pouvait pas passer à côté de la Maison du Rhum, début d’une nouvelle aventure pour Dugas qui semble lancer sa propre marque. Forte de sa connaissance du marché et des réseaux de distribution, la maison Dugas arrive avec cette gamme déjà bien fournie et très stylisée. Les bouteilles seront à coup sûr du plus bel effet dans les vitrines et les rayonnages des cavistes avec leur style rétro / colonial et leur boîte en bois agrémentée de sous-verres.

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Et le contenu, me direz vous ? La Maison du Rhum a compris que transparence et vieillissement tropical feraient l’objet de demandes d’un nombre croissant d’amateurs. Les rhums présentés ont donc vieilli intégralement dans leurs pays d’origine et ont été sourcés directement par la maison. Ainsi on peut éventuellement s’attendre à des profils un peu différents de ceux que l’on retrouve habituellement chez les embouteilleurs indépendants.

Côté transparence, chaque bouteille porte une petite étiquette avec date de distillation, d’embouteillage, type de fût et alambic utilisé. Le nom de la distillerie figure quant-à lui sur la contre étiquette. Ces informations sont intéressantes et permettent de s’amuser à comparer deux rhums différents (ou plus !) issus du même type de distillation, du même type de fût, de la même distillerie etc.

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Les rhums n’étaient pas tous disponibles à la dégustation, mais voici ceux que nous avons pu goûter :

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Le rhum de La Réunion provient de la distillerie Rivière du Mât. Élevé pendant 8 ans en fûts de chêne Français et ex-Cognac, il titre à 45%.

Végétal et épicé, son profil se rapproche de celui du tabac, avec une touche fumée ou brûlée typique de son origine. Doux en bouche, il s’ouvre sur des saveurs de vanille puis d’épices un peu plus corsées.

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Le rhum du Venezuela titre à 47% et a été distillé dans plusieurs pot-stills particuliers. Il est âgé de 7 ans.

D’un style assez léger et classique, il ne semble pas trop épais ni sucré, la sensation de rondeur viendra plutôt en bouche.

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Le rhum de Martinique est un “jeune vieux” de La Mauny assez typique, avec des notes boisées et de fruits à coque séduisantes. Épicé en bouche, la fraîcheur du rhum blanc d’origine est toujours bien présente, c’est un agricole tout à fait représentatif du style.

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Daniel Baudin, maitre de Chai de Trois Rivières / La Mauny / Duquesne, se déplace toujours avec une quantité assez impressionnante de références. Chaque rencontre est l’occasion d’apprendre quelques détails techniques car l’homme connaît son sujet, de la culture de la canne à la mise en bouteille.

Pas de grandes nouveautés cette année, si ce n’est un La Mauny VSOP qui refait surface après 1 ou 2 ans d’absence, et un Trois Rivières 2004 Single Cask pas si nouveau que ça mais que je n’avais jamais eu l’occasion de goûter.
Les millésimes récents de Trois Rivières sont selon moi tous intéressants, des 2001 aux notes de sous-bois exotique jusqu’au 2006 brut de fût à la présence saisissante.

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Ce 2004 vieilli en ex-fût de Bourbon du Missouri est très expressif pour ses petits 43%. Il est épicé, de manière gourmande, mais aussi et surtout très frais. Cette fraîcheur se transmet au boisé en bouche, ce qui porte les jolies notes de fruits exotiques séchés et de raisins secs, pour une impression finale équilibrée.

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La Favorite présentait deux nouveautés très attendues, faisant suite à ses plus grands succès de l’année passée. Les stars de cette année seront donc le Bel Air 2017 et le millésime 2009. Victimes de leur succès, les bouteilles n’ont malheureusement pas survécu jusqu’à mon arrivée.
Je pourrai simplement vous dire que le millésime 2009 (embouteillé en 2017) est une sélection de 25 fûts dont seront issues 5000 bouteilles. Des échantillons non réduits avaient été présentés en off lors du dernier Rhum Fest, et la distillerie a choisi de conserver l’option du brut de fût au vu des retours enthousiastes des amateurs.

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Restons dans le rhum agricole Martiniquais avec Saint-James, un autre grand nom de l’île qui présente 3 nouveautés cette année.

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Le Vintage 2001 n’est pas réellement une nouveauté puisqu’il s’agit du millésime 2001 embouteillé en 2011 qui revêt un nouveau packaging pour Dugas.
Assez jeune au nez, l’amertume des agrumes rejoint rapidement un bon bouquet d’épices pour un profil assez corsé.
La bouche se poursuit dans la même lignée, elle est boisée et épicée, légèrement fruitée.

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Le Single Cask 1997 fait suite aux Single Casks 1998 et 1999 qui ont déjà rencontré un franc succès. Cette cuvée célèbre les 20 ans de l’AOC Martinique. Ce très vieux rhum (1997-2016) a été élevé en petits fûts de chêne blanc Américain.

Le nez est intense, avec des fruits secs, de la réglisse. Il est profond, avec un tissage complexe de bois et de cacao.
L’attaque en bouche est plutôt acide et imprime ainsi immédiatement le palais. La bouche est épicée et plutôt corsée, il faudra laisser le rhum respirer pour qu’il gagne en gourmandise.

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La cuvée l’Essentiel est un assemblage des millésimes 1998, 2000 et 2003.

Son nez est fondu, particulièrement parfumé et entêtant, avec des tanins souples mêlés à une pâte souple d’écorces d’oranges et de fruits séchés.
L’attaque en bouche est délicatement poivrée, c’est aussi fondu qu’au nez, élégant et distingué, avec une longueur très fruitée et exotique.
Voici un rhum très réussi, du Saint James haut de couture, aussi séduisant que complexe.

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On sait que la distillerie Mauricienne de Chamarel propose des rhums qui ont des accointances certaines avec le whisky. Ses Single Blended Rums, issus d’assemblages de rhums de pur jus de canne distillés en colonne et en alambic, présentent à la fois des caractéristiques fruitées, florales mais aussi un peu cuivrées.
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La distillerie a souhaité rapprocher encore un peu plus les deux spiritueux en proposant une version de son XO (60% alambic et 40% colonne) ayant bénéficié d’une finition d’un an en fût de single malt de l’île d’Islay.

Au nez, on reste sur le profil du XO, avec un équilibre entre notes grillées et fruits exotiques secs, encadré par une touche cuivrée.
La bouche est très ronde et soyeuse, le rhum est pourtant épicé, mais il est habillé d’un voile velouté.
La finale est suave et fait ressortir un peu de whisky, avec le moelleux du malt.
Ce finish est réussi selon moi, car le fait de simplement ajouter des notes de tourbe de whisky d’Islay aurait plutôt tenu de la cosmétique et du gadget. Ici au contraire, le profil est complété de façon délicate et le rhum a gagné en moelleux, ce à quoi on ne se serait pas forcément attendu. A noter que pour l’occasion, Chamarel a utilisé la même jolie carafe que pour ses Single Barrel.

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Mon coup de coeur du salon s’est porté sur les rhums Manutea de Polynésie, distillés sur l’île de Moorea.
Ce sont des rhums de pur jus de canne de variété O Tahiti (endémique de la région) fermenté spontanément et sans adjonction d’eau, puis distillé en une simple passe en alambic.
Deux versions de rhums blancs étaient en dégustation.

La version à 40% est extrêmement plaisante, très nature, avec une canne suave et saisissante à la fois, et un petit poivre savoureux.

Déjà sous le charme, je suis passé à la version à 50% qui est encore un bon cran au dessus. Très expressive et aromatique, mais toujours aussi nature et suave, avec de la canne confite, des agrumes, une pointe d’artichaut à la vapeur.
En bouche le rhum exprime des notes réglissées ou anisées qui semblent être particulièrement propres aux rhums de la région. Équilibré et gourmand, il se termine sur des notes de marron glacé.

Cette eau-de-vie de canne est tout bonnement délicieuse et complémentaire avec le Mana’o qui lui se tourne plutôt vers le rhum agricole des Antilles.

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Le rhum Pixan nous vient du Mexique, de la Destileria Espiritus Del Norte à Monterrey. Il est distillé à partir de mélasse et vieilli en fûts de chêne américain. Pas d’informations sur le mode de distillation mais le nez a quelque chose d’intéressant, une profondeur et une variété qui donnent envie d’y passer un peu de temps.

La marque communique sur le fait que l’élevage s’effectue avec du sucre dans les fûts, et en effet, malheureusement le sucre écrase et masque complètement les arômes en bouche. Dommage.

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Je suis malheureusement arrivé trop tard pour me faire une idée sur le Toucan n°4, les dernières gouttes de la dernière bouteille me passant littéralement sous le nez.
Une base du très bon rhum blanc Toucan de Guyane passe un an en ex-fût d’Armagnac avec une infusion de boisé. La transparence est de mise en tout cas, reste à se faire une idée en dégustation, ce qui ne saurait tarder !

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Je ne vous ai pas parlé des maisons qui n’avaient pas spécialement d’actualité, même si c’était bien sûr un plaisir de re-déguster, juste par gourmandise, la finition Marquis de Terme d’HSE et le millésime 2002 de Depaz, entre autres.

Nico de l’équipe Rhum Attitude

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