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L’importance de la canne et du terroir dans la production du rhum

Le rhum agricole et le terroir

Depuis les origines du rhum tel qu’on le connaît aujourd’hui, qui remontent au tournant du XVIIIème siècle, le rhum était produit uniquement à base de mélasse, un sous-produit de la production sucrière. C’est en Martinique et en Guadeloupe que l’on a commencé à produire du rhum à partir du pur jus de la canne à sucre, dès la seconde moitié du XIXème siècle.

Au début de ce même siècle, la concurrence de la betterave du vieux continent et les blocus occasionnés par les guerres coloniales laissent d’énormes excédents de canne aux planteurs alors extrêmement nombreux sur ces îles. Cela mène à une réorientation de l’industrie de la canne à sucre en faveur du rhum et à une concentration des moyens de production en grandes usines centrales, ce qui conduit à esseuler les planteurs qui en sont un peu trop éloignés. Ces derniers commencent alors à distiller directement le jus de leurs cannes, donnant ainsi naissance au rhum « z’habitant » que l’on appellera plus tard « rhum agricole ».

En ce qui concerne les rhums de mélasse, les variétés de canne employées et le terroir dont elles sont issues n’ont que peu d’importance. En effet, pour produire du sucre, le jus de canne est cuit et recuit, ce qui lui ôte toutes ses spécificités au moment d’en récolter le sous-produit. On parle tout de même de plusieurs qualités de mélasse, mais leur classification repose plutôt sur les quantités de sucres fermentescibles qu’elles contiennent. Ce sont davantage les méthodes de fermentation, de distillation et de vieillissement qui vont différencier ces rhums dits industriels ou de sucrerie.

Dans le cas des rhums agricoles, outre les méthodes de production, la matière première est primordiale puisque l’on travaille avec un pur jus de canne très frais, ce qui donne lieu à une véritable eau-de-vie de canne à sucre.

Revenez plus en détail sur la différence entre rhums agricoles et rhums de mélasse dans notre article sur l’élaboration du rhum et les différents types de rhums.

Les variétés de canne à sucre

Voici quelques exemples de variétés de canne à sucre utilisées par les producteurs de rhum agricole. Beaucoup de ces cannes ont été élaborées à La Barbade, et quelques unes d’entre elles à La Réunion. Certaines sont plus récentes que d’autres, par exemple la R.583 a été officiellement plantée pour la première fois en 2008. Elles sont toutes de la famille Saccharum Officinarum et sont le résultat d’hybridations (souvent avec la Saccharum Robustum) qui leur ont permis de s’adapter chacune à un certain type de terrain ou de climat.

Vous trouverez également des exemples de rhums monovariétaux correspondant à chaque type de canne.

Canne zicak                                       B.80.08                                 Neisson L’Esprit Bio 70°

Canne bleue                                      B.69-566                               Clément Canne Bleue 2020

Canne cristalline                              Non hybride                         Clairin Sajous

Canne noire                                      B.46-364                               Bologne Black Cane

Canne rouge                                      R.579                                    Longueteau RSMA Canne Rouge 60°

Une espèce primitive un temps oubliée a été réintroduite sur l’atoll de Rangiroa en Polynésie Française, il s’agit de la O’tahiti. Elle est à l’origine des rhums Mana’o et Manutea et constitue une espèce à part entière qui fait aussi partie de la lignée de la reine Saccharum Officinarum.

La notion de terroir

La notion de terroir fait son chemin chez les producteurs et chez les amateurs, et avec elle l’intérêt pour la transparence et la compréhension du produit. C’est ainsi que des cuvées monovariétales (à l’image des vins mono-cépages) ont vu le jour au début des années 2000, Clément en étant le fer de lance. Bien entendu, certaines cuvées étaient déjà monovariétales (comme le Neisson 52,5 par exemple) mais les distilleries ne souhaitaient pas nécessairement en faire état jusque là.

Ce qui a dans un premier temps été perçu comme un seul argument marketing a finalement eu des retombées intéressantes. Cela a été le signe d’une demande croissante de transparence et d’appréhension de cette notion de terroir. En comprenant que la variété de canne (et avant tout son terroir) était importante dans le caractère du rhum, l’amateur de spiritueux a également compris que les années de récoltes et leurs conditions climatiques avaient aussi une grande incidence.

HSE a donc elle aussi décidé de mettre en valeur ses rhums blancs en indiquant l’année de leur récolte. Puis c’est Longueteau en Guadeloupe qui a fait grand bruit 10 ans plus tard en présentant non seulement des sélections monovariétales, mais aussi mono-parcellaires, sans doute plus pertinentes encore. La notion de terroir est ainsi parfaitement appréhendable lorsque l’on compare une canne rouge issue du bord de mer à une autre qui a grandi dans un endroit plus sec.

Car il s’avère que finalement la variété de canne utilisée compte beaucoup moins que l’ensoleillement, l’orientation, la pluviométrie ou le sol de sa parcelle. Voila ce que signifie la notion de terroir dans le rhum agricole. Ce sont ces critères qui vont déterminer sa richesse en sucre, au même titre que la fraîcheur de sa coupe où la façon dont elle aura été broyée.

Le respect ultime du terroir : le Bio

Le Bio est désormais l’étape suivante vers un respect intégral de la matière première et du terroir. Neisson s’est lancée dans l’aventure avec succès, suivie par A1710 ou par Mana’o à Tahiti. Les parcelles de canne Bio se multiplient en Martinique, et l’agriculture raisonnée (si elle n’est pas forcément certifiée Bio) fait des émules à travers le monde.

Chez les producteurs de rhums agricoles Bio, on obéit au cahier des charges extrêmement strict du label AB. Il faut d’abord que la parcelle soit vierge de tout polluant dangereux, ce qui doit être anticipé très longtemps à l’avance car cela nécessite une période de conversion des terres. Au cours de cette conversion des parcelles et bien entendu par la suite, on n’utilise pas de produits phytosanitaires autres que Bio et on opte pour le désherbage manuel ou mécanique, entre beaucoup d’autres choses, ce qui occasionne des coûts très importants.

En récompense de tous ces efforts, on obtient des rhums qui n’ont été en aucun cas perturbés par des intrants extérieurs. Ce sont les expressions les plus fidèles possibles du terroir, sans toutefois pousser trop loin l’analogie avec le vin, car le rhum est un produit distillé qui laisse tout un tas d’éléments en bas de l’alambic.

On peut également noter que Neisson cultive ses propres levures venues de ses parcelles Bio. Il s’agit d’une étape supplémentaire vers une retranscription intégrale de leur terroir.

Chez A1710, on a choisi de présenter deux parcelles Bio différentes, une où pousse la canne bleue et une autre où l’on cultive la canne rouge. Cet exercice didactique et ludique se solde de surcroit par deux excellents rhums.

 

Retrouvez une brève histoire de la canne à sucre dans le précédent article qui lui était consacré.

5 réflexions au sujet de « L’importance de la canne et du terroir dans la production du rhum »

  1. Bjr puis je savoir pour preparer le rhum quel est le dosage c’est a dire quelle quantité de melasse p ? pour quelle quantité d’eau ? avant l’etape de fermentation ?
    merci cordialement

    1. Bonjour,
      En général pour préparer un moût, on utilise 6 ou 7 litres d’eau pour 1 litre de mélasse. Bonne journée 🙂

  2. Iaorana quel est la variété de canne a sucre le plus demander. CAr je voudrais me lancer dans plantation a Rurutu
    Merci et bonne journée.

  3. Canne verte B.76-56 Montebello Winch
    Moi qui pensait que c’était de la canne rouge…

    1. Bonjour, il semblerait que la recette ait en effet changé, puisque Montebello communique désormais sur la canne rouge. Merci pour cette remarque, nous avons modifié l’article en conséquence.

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